Il est temps de s’intéresser à la Syrah, ce magnifique cépage sur lequel on pourrait écrire encore et encore tant il est complexe, passionnant et présent sur presque tous les continents du globe.

Dessin de grappe de Syrah
Ampélographie de Pierre Viala et Victor Vermorel (Masson, 1901-1910)

On ne savait rien de précis sur l’origine de ce cépage jusqu’à peu de temps. Pour certains, il serait originaire de la ville de Schiraz en Iran prétextant que les plants ont étés rapportés par le chevalier de Stérimberg, de ce pays ou de Chypre ; chevalier qui s’établit en 1224 sur le coteau de l’Hermitage (Côtes du Rhône septentrionale). Pour d’autres, l’introduction de ce cépage en France daterait du IIIème siècle lorsque l’empereur Probus autorisa la reprise des plantations de vigne en Gaule. Pour clore la valse de ces origines plus ou moins hypothétiques, certains historiens pensent que la Syrah viendrait de la ville de Syracuse en Sicile.

Croyez moi ou non, aucun de ces lieux d’origine supposés ne voit plus ce cépage s’épanouir sur ses sols aujourd’hui !

En revanche, quand la génétique s’en mêle, on met souvent le doigt sur des vérités cachées. Fruit d’un travail de recherche entre l’Université de Californie et le centre de recherche de Montpellier SupAgro, la légende et les mystères de la Syrah sont tombés. C’est une analyse génétique qui montre que la Syrah est en fait à l’origine d’un croisement naturel et spontané entre deux cépages : la Mondeuse Blanche de Savoie avec le Dureza originaire de l’Ardèche.

Ce cépage est donc français et plutôt récent ! Cocorico ! A quand les prochaines surprises ?

Une syrah française et multilingue

Aujourd’hui, la Syrah est largement diffusée dans le monde. Son berceau se situe dans la vallée du Rhône septentrionale, elle migra vers le sud de la France au début du 19ème siècle. Poussée par des résultats encourageants dans la Drôme et le Vaucluse malgré un climat plus chaud, elle s’exporta rapidement à l’extérieur de notre territoire : Californie, Australie (où elle est le cépage principal) sous le nom de Red Hermitage ou Hermitage, Afrique du Sud, Argentine, Chili en sont les principaux exportateurs. Les producteurs méditerranéens comme l’Italie ou la Grèce ne commencèrent à s’y intéresser que dans les années 50.

En France la culture de la Syrah a connu de fortes expansions passant de 1 608 hectares en 1958 à 68 600 en 2007. Avec 43 200 hectares, le Languedoc-Roussillon a la plus grande surface de plantation.

Ce cépage compose l’encépagement de nombreuses AOC des Côtes du Rhône : Côte-Rôtie, Cornas, Saint-Joseph, Hermitage, Châteauneuf du Pape pour ne citer qu’elles.

Sa culture en Languedoc est plus récente pour les AOC Coteaux du Languedoc : Saint-Chinian, Faugères, Minervois, Corbières, Fitou, Côtes du Roussillon, Banyuls, Maury, Rivesaltes etc.

Son succès est incontestable sur la planète vin. Pourquoi ? La Vallée du Rhône dans les années 1980, a connu un élan de popularité chez les amateurs à un tel point que la Syrah est devenue une référence universelle.

Chaque année a lieu un concours confrontant les meilleures Syrah du monde. En 2010 avait lieu la quatrième confrontation : pas moins de 387 échantillons ont été dégustés par des professionnels venus du monde entier.

Pas si capricieuse que cela cette Syrah

A l’aise dans tous les sols et les climats, la Syrah est une baroudeuse. De vigueur et de fertilité moyenne, elle fait face à la sécheresse des Côtes du Rhône, du Languedoc Roussillon sans grande difficulté. Schiste, granit, galets roulés, gneiss lui conviennent si bien que c’est sur les terres caillouteuses et chaudes où les sols sont moyennement fertiles et bien drainés qu’elle donne des vins puissants et complexes.

Elle est tout de même sensible aux fortes sécheresses, à la chlorose, à la pourriture grise, aux acariens et aux vers de la grappe. Ses rameaux sont sensibles aux forts vents qui cassent assez facilement.

La feuille adulte est de taille moyenne d’un vert sombre et glabre (sans poils), la face inférieure est pâle et revêt un léger duvet au niveau des nervures.

Des vins reconnaissables

Le déplacement de la Syrah, du Nord vers le Sud, a provoqué des modifications dans le bouquet des vins obtenus.

  • Dans les Côtes du Rhône septentrionales : des arômes floraux avec des dominantes de violette poivrée. Avec le temps, cet ensemble aromatique devient truffe, réglisse (un bonbon cachou).
  • Dans le sud, le complexe aromatique de la Syrah est surtout dominé par des parfums de petits fruits rouges et noirs : framboise, cassis, myrtille que le temps transforme en des notes de framboise sauvage, truffe et noyau. L’ensemble est rendu plus « rude » qu’au Nord bien souvent par le climat sec et chaud au point de dégager une sensation de sécheresse. L’assemblage devient alors providentiel, la Syrah apportant son intensité aromatique et sa relative lenteur à évoluer au Grenache et au Cinsault, alors que ceux-ci apportent souplesse et liant. Le Mourvèdre apporte lui plus de charpente encore dans la jeunesse puis une complexité aromatique des plus déroutantes.

Petite parenthèse sur les Syrahs jeunes qui présentent parfois (pas assez souvent) des goûts intenses d’épices. Très souvent je me suis fait la réflexion. 95% du temps ces Syrahs mûrissent sur des terroirs reconnus et à de faibles rendements. Ces vins sont emprunts d’une très belle acidité qui pourrait parfois déranger certains palais mais qui participe à cet ensemble rempli de fraîcheur qui fera des vins prêts à vieillir de nombreuses années (10 ans et plus).

Pour finir et n’oublier personne, le Languedoc Roussillon regorge de très bons rosés à base de Syrah. Avec un rendement plus important et sur des terroirs moins nobles comme les plaines par exemple, ce cépage est un excellent producteur de rosés un peu comme le Mourvèdre.

C’est aussi l’un des cépages dont les vins sont les plus riches en resvératrol, molécule dont plusieurs essais cliniques ont montré les effets cardio-protecteurs, anti-oxydants et anti-cancérigènes.

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