Selon certaines estimations, 85 % des consommateurs français préfèrent un vin bouché par du liège.
Pourtant, on remarque qu’environ 4 à 10 % des bouteilles bouchées par du liège présentent le défaut nommé « goût de bouchon« .
Histoire de faire le point sur la question nous allons voir d’où vient l’utilisation du bouchon de liège, l’origine du « fameux » caractère bouchonné d’un vin et les alternatives existantes pour éviter ce problème. Et on vous donnera aussi une petite astuce pour récupérer un vin bouchonné.
Pourquoi utilise-t-on des bouchons de liège ?
L’utilisation généralisée du bouchon de liège serait le fait de Dom Pérignon, le célèbre moine champenois qui aurait été « tuyauté » par nos cousins d’Outre-Manche, lesquels – on le sait – sont maîtres dans l’art de consommer le vin, à défaut de le faire …
Au delà de l’éternel débat avec nos cousins bretons – qui n’a guère plus de sens à l’heure du village global (notamment puisque aujourd’hui le liège est majoritairement produit au Portugal) – on retiendra que le liège possède des propriétés qui nous intéressent tout particulièrement.
Citons entre autre : l’étanchéité (exclusivement au contact de liquide, ce qui explique d’ailleurs que le vin doit vieillir couché) mais également l’élasticité qui permet à notre bouchon d’obturer totalement le goulot de la bouteille. Enfin, cerise sur le gâteau, le bouchon de liège dégage un bruit charmant qui saura étouffer le brouhaha d’une assemblée d’assoiffés plus communément dénommés « amis ».
Bref, le bouchon de liège c’est comme le fil à couper le beurre : un procédé révolutionnaire.
Le goût de bouchon qu’est ce que c’est ?
Au tournant des années 90, alors que l’œnologie et les techniques d’analyses s’affinaient, on a commencé à parler sérieusement du « goût de bouchon« . Tout à l’heure je disais « fameux » mais étant donné que c’est loin d’être le cas je précise ici que c’est une façon de parler.
Après de longues études sur le sujet est apparu un terme pas très orthodoxe : 2,4,6 trichloroanisol (ou TCA pour les intimes). Le TCA est donc la molécule principalement responsable du goût de bouchon.
A faible concentration il agit en tant que « masque aromatique » et au delà d’un certain seuil il s’exprime tellement qu’on ne sent plus que ça : une odeur extrêmement persistante située entre le bois moisi, le pourri, l’eau croupie et la poussière … Notez que le caractère bouchonné ne correspond pas à l’odeur de liège. Si vous sentez un bouchon de liège de bonne qualité (et non bouchonné), ça sent tout simplement le liège …
Le problème avec cette molécule c’est qu’elle est perceptible dès de très faibles concentrations (quelques nanogrammes par litres soit quelques 0,000000001 grammes/l). Il suffit donc d’une très faible contamination pour que l’arôme (et non pas le goût) se développe dans le vin. Tout ça pour dire que l’histoire, encore une fois, se joue à quelques nanogrammes près. Le seuil de perception du TCA varie entre 1,5 et 3 ng/L en fonction de la sensibilité et l’expertise des dégustateurs.
La perception, justement, parlons-en. La nature étant naturellement injuste, nous n’avons pas la même capacité à percevoir ce défaut. La cause : nos récepteurs olfactifs qui ne seraient pas identiques (ceci est d’ailleurs valables pour toutes les molécules odorantes). Bien heureusement l’entrainement et la persévérance sauront venir à bout de votre « hyposmie ».
D’où viennent ces satanés TCA responsables du goût de bouchon ?
Eh bien, la réponse n’est pas tout à fait certaine. Si un liège altéré par un champignon semble bien être la cause dans la majorité des cas, les traitements anti-xylophages des charpentes comme les traitements anti-feux des armoires électriques pourraient avoir leurs responsabilités. La désinfection de la vaisselle vinaire avec du chlore conférerait également au vin le caractère bouchonné.
Enfin, le vin présente parfois certains défauts, souvent dus à une mauvaise hygiène et proches du goût de bouchon et il arrive qu’ils soient parfois confondus. Remarquez que le vrai goût de bouchon (provenant du bouchon lui-même) se distingue des autres du fait que toutes les bouteilles ne sont pas forcément touchées …
Quelles sont les alternatives pour éviter le goût de bouchon ?
Vous n’êtes pas sans imaginer que toute la filière viti-vinicole se préoccupe énormément de ce problème. A tel point qu’aujourd’hui on a trouvé plusieurs options pour s’affranchir à coup sûr du caractère bouchonné.
On citera entre autre la capsule à vis à vis ou le bouchon synthétique, qui ne possèdent certes pas le charme du liège, mais permettent d’éviter ce genre de déconvenue. Avec le recul que l’on a aujourd’hui, on peut dire que cela convient parfaitement pour des vins à boire jeunes.
Un tout nouveau procédé qui consiste à soumettre le liège à du « gaz carbonique supercritique » permettrait également de produire des bouchons agglomérés totalement exempts de TCA. Les premiers retours sont d’ailleurs extrêmement positifs.
Dernièrement, il a été découvert que de faire tremper du film étirable de cuisine pouvait sauver en partie un vin bouchonné. Le test a été mené de manière scientifique par des chercheurs de l’Institut Scientifique de la Vigne et du Vin (ISVV) de Bordeaux qui ont fait le test sur 3 barriques à différents niveaux de concentration de TCA. Et au miracle, cela n’affecterait pas les autres arômes naturels du vin. A essayer lors de votre prochaine dégustation en cas de vin bouchonné.
Mais avant tout, n’oubliez surtout pas que le producteur n’est pas mauvais pour autant qu’une de ses bouteilles ait été bouchonnée. Malheureusement, il n’y ait pas pour grand-chose.
Une réponse